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Tchad : ce que l’on sait de la tentative de coup d’État déjoué 

14 janvier 2023
4 min
cmt tchad mahamat deby

Dix officiers de l’armée nationale tchadienne et un leader d’une organisation de défense des droits de l’homme sont placés sous mandat de dépôt le 5 janvier 2023. Ils sont accusés par le gouvernement de transition de fomenter un coup d’Etat. Chronologie des faits. 

Du 3 au 11 décembre 2022, une dizaine d’officiers de l’armée nationale tchadienne et le président de l’Organisation tchadienne de défense des droits de l’Homme (OTDH), Baradine Berdei Terguio, ont été interpellés par les services du Renseignement militaire. Le 13 décembre, le porte-parole de l’armée, Général Azem Bermadoa Agouna, les accusait de projeter des actions tendant à perturber les institutions de la République. Ces personnes, dit-il, étaient surveillées par les éléments de la Direction générale des Renseignements militaires (DGRM) qui ont mis fin à leur projet en les interpellant. 

5 janvier 2023. C’est au tour du porte-parole du gouvernement, Aziz Mahamat Saleh d’informer l’opinion publique que les présumés auteurs de cette tentative de déstabilisation sont inculpés et placés sous mandat de dépôt. Ils doivent répondre des chefs d’accusation d’atteinte à l’ordre constitutionnel, association de malfaiteurs, détention illégale d’armes à feu et complicité. 

Gardés à vue dans un premier temps à la Maison d’arrêt et de correction de Klessoum, à la sortie Sud-Est de N’Djamena, ils ont été transférés, dans un deuxième temps à la prison de haute de sécurité de Korotoro située à 600Km au Nord de N’Djamena. 

Le 6 janvier, les militaires impliqués dans cette affaire ont été cassés au grade de soldat de 2e classe et radiés de l’effectif des forces armées par un décret du président de transition, Général Mahamat Idriss Déby. 

7 janvier 2023. Le collectif d’avocats du président de l’OTDH s’est prononcé sur la procédure au cours d’un point de presse. Il réclame son annulation arguant qu’elle est « en parfaite rupture avec la loi » et dénonce la déportation de leurs clients hors du ressort du territorial de la Cour d’appel de N’Djamena.

« Un vrai faux coup d’Etat » ?

Dans le milieu politique et de la société civile, beaucoup peinent à croire à cette tentative de coup d’Etat. Le président du Parti Socialiste sans Frontières (PSF) Yaya Dillo Djerou Betchi évoque pour sa part un « vrai faux coup d’Etat » orchestré par le gouvernement pour régler des comptes avec le président de l’OTDH, Baradine Berdei Targuio (le gouvernement l’accuse d’être le cerveau de ce coup de force). « Il avait publiquement déclaré qu’il détient les preuves matérielles sur l’assassinat du président Déby. Pour le faire taire, un vrai coup d’Etat a été imaginé et mis à son actif pour le jeter en prison », dit-il. Point de vue que partage le politologue, Dr Evariste Ngarlem Toldé qui s’interroge sur la capacité d’un civil à organiser un coup d’Etat. « Il n’y a qu’au Tchad qu’on peut vous servir un tel scénario. C’est cousu avec du fil blanc. On sait que Baradine est du clan au pouvoir mais il n’a jamais voulu pactiser avec le système », assène-t-il.

C’est la première supposée tentative de coup d’Etat que les militaires ont déjoué depuis leur arrivée au pouvoir le 20 avril 2021 à la suite de la mort du président Idriss Déby Itno. Mais cette tentative de coup d’État, si elle est avérée, ne semble pas avoir trop inquiété le président Mahamat Idriss Déby qui avait effectué un voyage le lendemain aux Etats-Unis.

Dr Evariste Ngarlem Toldé parle d’un profond malaise que cette situation a causé au sein de l’exécutif tchadien.

Avec la mort du président Idriss Déby Itno, le Tchad vit une période de transition qui suscite de la tension de tous les côtés. Si un coup d’Etat venait à se produire actuellement au Tchad, analyse Dr Evariste Ngarlem Toldé, le pays risquerait de sombrer dans une guerre interminable. « Ce sera une guerre sans fin d’abord au sein du clan et ensuite de tranchée. Et les gens ne seront pas prêts à arrêter car, actuellement le Tchad ressemble à une poudrière avec des maisons ransformées en des camps militaires », s’inquiète-t-il. 

Par Christian Allahadjim

Correspondant à N'Djamena au Tchad