Tribune par Adji Bousso Dieng. Chercheuse spécialisée en intelligence artificielle Adji Bousso Dieng est la première femme noire professeure à l’École d’ingénierie et des sciences appliquées de l’Université de Princeton, aux États-Unis. La sénégalaise est également la présidente et fondatrice de ‘The Africa I Know’ (TAIK), une ONG et plateforme qui met notamment en lumière les réussites de personnalités africaines. Pour la chercheuse “la situation actuelle au Sénégal est similaire, bien que les détails diffèrent, à celle qui a conduit à l’élection de Macky Sall”
Nous devons à notre cher Sénégal d’être plus sélectifs et d’établir des normes plus élevées pour ceux qui aspirent à diriger ce beau pays.
Il ne fait aucun doute que le Sénégal traverse actuellement l’une des périodes les plus difficiles de son histoire. Nous avons repoussé les limites de ce que nous pensions être capables de faire en termes de violence. Cependant, ce qui se passe actuellement dans notre pays n’est pas totalement nouveau si l’on considère la situation dans sa globalité. Les jeunes sont frustrés et se sentent légitimement trahis par le régime en place. Ils ont placé leur confiance en Ousmane Sonko, leader de l’opposition, et voient en lui quelqu’un qui peut nous conduire vers le développement. Cette situation est similaire, bien que les détails diffèrent, à celle qui a conduit à l’élection de Macky Sall: nous avions voté pour lui en tant qu’alternative à Abdoulaye Wade. Nous voyions en Macky Sall quelqu’un qui pouvait conduire le pays vers le développement. Le schéma qui se dégage ici est, selon moi, au cœur du problème : nous avons tendance à placer nos espoirs d’un avenir meilleur entre les mains d’un individu.
Le travail à accomplir pour atteindre le développement dépend de nous tous, citoyens lambda aussi bien que ceux que nous élisons pour nous diriger. Le développement d’une société est un acte quotidien individuel de discipline et de rigueur qui se reflète sur la société dans son ensemble au fil du temps. Le rôle de ceux que nous choisissons d’élire au pouvoir n’est pas de développer le pays, mais de nous permettre d’acquérir tous les outils nécessaires pour apporter notre meilleure contribution à notre objectif commun de développement. Cela signifie que le travail de nos dirigeants élus est de mettre en place les infrastructures nécessaires pour notre santé, notre éducation et nos activités. Nos dirigeants ont historiquement échoué à cet égard, détournant leur attention loin de ces besoins fondamentaux.
Ramenons des normes dans la scène politique sénégalaise
En tant que citoyens, nous avons failli en ne demandant pas à ceux que nous élisons d’avoir les compétences, la compassion et l’humilité nécessaires pour accomplir le travail décrit ci-dessus. Je suis particulièrement consternée par le manque de normes dans la scène politique sénégalaise actuelle. Nous devons à notre cher Sénégal d’être plus sélectifs et d’établir des normes plus élevées pour ceux qui aspirent à diriger ce beau pays. Une exigence minimale pour toute personne cherchant à être élue devrait être de présenter publiquement un programme clair et concret pour le pays ainsi qu’un plan pour sa mise en œuvre une fois élue. Ramenons des normes dans la scène politique sénégalaise, exigeons des politiciens actuels et aspirants qu’ils soient compétents, transparents et compatissants.
Que Dieu protège le Sénégal.