Mardi soir, le président tunisien Kais Said a limogé la cheffe du gouvernement Najla Bouden, en poste depuis octobre 2021. Son 4e Premier ministre, Ahmed Hachani, ancien haut fonctionnaire de la Banque centrale de Tunisie, peu connu du grand public, est installé dans ses fonctions lors d’une cérémonie organisée au palais de la présidence à Carthage, banlieue située au nord de la capitale Tunis. Comment les médias locaux ont commenté la nouvelle ? Qui est-il ?
Le président tunisien a désigné Ahmed Hachani au poste de Premier ministre, un ancien haut cadre de la Banque centrale du pays. Il succède à la désormais ex-cheffe du gouvernement Najla Bouden. En poste depuis octobre 2021, madame Bouden est limogée mardi 1er août, peu avant minuit. Mercredi matin, au réveil, c’est avec grande surprise que Tunisiens ont fait la connaissance du quatrième Premier ministre du quinquennat de Kais Said.
M. Hachani, retraité depuis 2018 de son poste de directeur général des ressources humaines à la Banque centrale de la Tunisie, est le 11e Premier ministre depuis la révolution de 2011. Il a étudié à la Faculté de droit de l’Université de Tunis en 1983, selon les premières informations publiées par les médias locaux. Il s’agit de la même université où l’actuel chef de l’Etat a enseigné le droit constitutionnel.
Il y a très peu d’informations, pour ne pas dire presque rien, sur la personne du nouveau chef du gouvernement tunisien.
Selon les informations recueillies sur internet, Ahmed Hachani a intégré en 1986 la Banque centrale de Tunisie en tant que juriste. En 2011, il est promu au poste de directeur général des ressources humaines. Il a également enseigné le droit à l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers (APTBEF). Hachani a aussi occupé des responsabilités au sein du ministère des Finances, indique-t-on.
En effet, jusqu’à mercredi matin, Ahmed Hachani était inconnu au bataillon de la politique tunisienne. Il est décrit, par les médias, comme étant un « fervent défenseur de la laïcité de l’État, de la démocratie et de l’égalité des droits entre femmes et hommes ».
« Nous avons devant nous beaucoup de défis »
A la fin de la cérémonie de prestation de serment, dont une vidéo a été publiée sur la page Facebook de la présidence tunisienne, nous pouvons entendre le président Kais Said, serrant la main du nouveau premier ministre, donner les premières instructions, faisant fi de l’agenda à suivre.
« Nous avons devant nous beaucoup de défis qu’il nous doit de surmonter avec détermination et volonté fortes pour sauvegarder notre État et la paix sociale dans le pays », a-t-il prévenu son nouveau Premier ministre Hachani.
A en croire un communiqué de la présidence, Ahmed Hachani n’a pas été chargé de former un nouveau gouvernement. Il sera chargé de diriger un gouvernement déjà en exercice. Il a prêté serment devant le président du pays directement sans avoir à passer devant l’Assemblée parlementaire pour valider sa nomination.
Il est prévu, cependant, qu’il s’exprimera à la prochaine rentrée parlementaire, devant l’hémicycle, pour présenter les grands axes de sa politique, annoncent les médias locaux. Ces derniers s’interrogent, toutefois, « si le nouveau Premier ministre viendra à exercer ses fonctions dans l’ombre du président, comme l’était Najla Bouden ou va-t-il apporter ses marques et avoir un autre type de rapports avec le Chef de l’Etat ?».
En vertu de la Constitution du 25 juillet 2022, le Premier ministre sera sous les ordres du président de la République et aura à lui rendre des comptes. Ce dernier est le seul à avoir les pouvoirs de tracer les politiques générales du pays.
Comment expliquer cette décision ?
Alors qu’aucune explication officielle n’est donnée quant à cette soudaine décision, les médias tunisiens sous-entendent que l’ancienne Première ministre limogée a failli à apporter des solutions aux pénuries que connait le pays, dont celle du pain. Le pays vit, en effet, une pénurie de pain dans les boulangeries subventionnées par l’État, entre autres produits de bases. Dans une récente déclaration, le président tunisien Kais Said a fait comprendre que la question du pain est une ligne rouge pour les Tunisiens.
Sur les réseaux sociaux, dès l’aube de ce mercredi, les avis et les émotions des Tunisiens sont partagés, entre ceux encourageant et ceux s’interrogeant sur les raisons de ce choix ou encore la personne de M. Hachani. Et pour cause, personne ne l’a vu venir. Le Palais présidentiel n’a rien communiqué au préalable sur ce sujet.
« Ni toi, ni nous ne le connaissons », écrit une internaute en réponse aux encouragements et félicitations postés dans un commentaire, sur la publication du compte de la présidence tunisienne sur le réseau social de Facebook.
Seule démocratie post-printemps arabe, telle qu’elle est qualifiée par les médias, la Tunisie se trouve aujourd’hui dans une situation inextricable. Le navire Tunisie navigue à vue. Après plus d’une décennie, l’économie du pays suffoque, alors qu’une hausse du nombre de chômeurs est enregistrée atteignant le taux de 16,1%. Sur la question des libertés, elles sont nombreuses les entorses et violations flagrantes des droits individuels et libertés politiques, selon plusieurs organisations de défense des droits de l’homme, citant notamment des arrestations de plusieurs leaders de l’opposition, de journalistes, d’anciens ministres ou encore d’hommes d’affaires.