Le président de transition du Mali, le colonel Assimi Goïta, arrivé au pouvoir à la suite du coup d'État du 18 août 2020, jouit d’un large soutien populaire. Les données d'une enquête menée par le réseau panafricain Afrobaromètre et Mali-Mètre, dirigée par la fondation allemande Friedrich-Ebert-Stiftung depuis 2012, indiquent un niveau élevé de satisfaction à l'égard du régime militaire. Dans le sondage Mali-Métre de 2024, neuf répondants sur dix estimaient que le pays allait dans la bonne direction. Pourtant, la situation économique des Maliens se détériore.
Par Morten Bøås, Norwegian Institute of International Affairs and Viljar Haavik, Norwegian Institute of International Affairs
Dans une analyse récente, la Banque mondiale a souligné que la junte avait du mal à assurer des services publics dans un contexte de croissance morose, d'inflation élevée et d'extrême pauvreté.
Le fait que les Maliens semblent toujours très satisfaits de leur dirigeant nécessite quelques explications.
Dans un article récent, fondé sur une vaste expérience de terrain au Mali, nous montrons comment Goïta a construit un nouveau contrat social sur un discours autoritaire, s'érigeant en protecteur du Mali. Le régime a instrumentalisé le mécontentement suscité par les interventions internationales pour présenter Goïta comme un « homme d'exception » pour des “temps exceptionnels”, en s'appuyant sur les mythes et les traditions maliennes.
Nous montrons comment le nouveau contrat social du régime ne repose pas sur l'offre de services publics, mais sur l'idée que Goïta est le défenseur et le libérateur du Mali. Le régime a ainsi établi un lien social avec la population qui place la dignité au-dessus de tout.
Un nouveau lien social
En 2012, le Mali a connu une grave crise déclenchée par une rébellion séparatiste dans les régions du nord du pays. Des groupes insurgés djihadistes ont pris le contrôle de la rébellion, conduisant à un coup d'État militaire. Des interventions internationales ont suivi. La Cedeao, l'ONU et la France ont déployé des efforts pour rétablir la sécurité, la stabilité et la paix.
Mais le déploiement de 5 000 soldats français et de 15 000 casques bleus de l'ONU n'a pas empêché la détérioration de la situation sécuritaire.
Dans le même temps, les institutions démocratiques maliennes n'ont pas réussi à rétablir le contrôle du territoire et à lutter contre la corruption et la pauvreté, malgré la tenue d'élections régulières.
Des manifestations massives réclamant la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta ont ouvert la voie au coup d'État militaire de 2020.
Ces échecs ont fourni à la junte un terreau fertile pour asseoir sa légitimité. Avec Goïta est apparu un nouveau discours, qui ne porte pas sur la construction d'un État libéral et le développement, mais sur le rétablissement de la souveraineté et de la dignité du Mali.
Ces idées sont relayées dans des discours prononcés lors de forums tels que l'Assemblée générale des Nations unies et dans des discours publics relayés par les médias, ainsi que par un réseau organisé d'influenceurs en ligne.
Les débats publics sur la lutte contre les forces du néocolonialisme et la revendication de la souveraineté sont antérieurs à la junte. Le régime a exploité ces sentiments. Il oppose des décennies d'humiliation, de faiblesse et de dépendance vis-à-vis de la France à une vision glorifiée du passé antique du Mali.
Les mouvements de protestation populaires tels que
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