Depuis la manifestation du 20 octobre 2022 qui avait dégénéré avec la mort de plusieurs dizaines de protestateurs sous les balles des forces de l’ordre, les leaders de l’opposition qui avaient appelé à la mobilisation sont entrés en clandestinité. Pourtant aucune poursuite judiciaire n’est officiellement engagée contre eux.
Mais où sont Me Max Loalngar, porte-parole du mouvement citoyen Wakit Tamma, Dr Succès Masra, Dr Sitack Yombatina Béni, Djasrabé Kimassoum alias Ray’s Kim du parti Les Transformateurs, Pr Avocksouna Djona du parti Les Démocrates ? Depuis les manifestations sanglantes du 20 octobre 2022, ces leaders politiques et de la société civile sont entrés en clandestinité. Ils sont accusés par le gouvernement d’être à l’origine de ce qu’il qualifie d’insurrection armée pour renverser le pouvoir de transition en place. Mais aucune action judiciaire n’est officiellement engagée contre eux, même si le chef du gouvernement de transition, Saleh Kebzabo a laissé entendre qu’ils pourraient être poursuivis.
Succès Masra au Cameroun ?
Dr Succès Masra est le seul du groupe à être localisé. Officiellement il est au Cameroun. Les autres ont pris des directions qu’on ignore jusque-là. Mais tous, excepté Dr Sitack Yombatina Béni, interagissent régulièrement via les réseaux sociaux. Leurs numéros de téléphone ordinaires ne répondent plus. Silence radio.
Si ces personnalités se sont cachées depuis déjà un mois et demi, c’est d’abord pour des raisons de sécurité, affirme un avocat sous couvert d’anonymat. « Déjà qu’après la manifestation, il y avait une chasse à l’homme. On a enregistré de nombreux cas d’enlèvement des personnes supposées être militants de tel ou tel parti ou de telle ou telle organisation de la société civile. Alors c’est normal qu’ils se mettent à l’abri », dit-il. Ensuite, pour pérenniser la lutte. « En politique, le meneur de jeu doit toujours être protégé. Parce que si on l’élimine, c’est la fin du jeu », pense un référent du parti Les Transformateurs. Enfin, c’est une question de stratégie. « Peut-être qu’ils ont battu en retrait pour mieux réorganiser les troupes et penser d’autres stratégies de lutte », poursuit-il.
Rappel des antécédents judiciaires
En octobre 2021, trois leaders de la plateforme Wakit Tamma, un mouvement politico-civil, parmi lesquels Dr Sitack Yombatina Béni sont gardés à vue après une marche. En mai 2022, six leaders de la plateforme Wakit Tamma, parmi lesquels Me Max Loalngar, interpellés après une manifestation, ont été condamnés à six mois d’emprisonnement avec sursis en juin. Au mois de septembre 2022, c’est au tour de Dr Succès Masra d’être convoqué par le parquet pour des propos ambigus tenus lors d’un meeting. Cette convocation a donné lieu à un mouvement de foule qui a fini en affrontement entre force de l’ordre et les militants du parti Les Transformateurs. Le parquet était obligé de mettre en veille la convocation à la demande du comité d’organisation et du présidium du dialogue national inclusif et souverain
L’artiste Ray’s Kim, porte-parole des Transformateurs, est le seul du groupe à ne pas avoir affaire à la Justice. Mais il est l’objet d’intimidations et de menaces des services de sécurité depuis qu’il a commencé par s’opposer au cinquième mandat du défunt président Idriss Déby Itno en 2016, puis au sixième et actuellement à la prolongation de la transition.
La question reste de savoir si ces leaders réapparaissent, seront-ils inquiétés ou pas par la Justice. A cette question, les autorités n’ont pas encore apporté une réponse claire.