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[Tribune] : Le panafricanisme n’est pas un dogme

09 juin 2023
4 min

Auteure de nombreux ouvrages, publiés au Mali, en France, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso, dont Le banquet des cantatrices qui lui a valu en 2022 le prestigieux prix Massa Makan Diabaté de la Rentrée littéraire du Mali, Aïcha Yatabary, médecin de formation, consultante en Santé publique axée sur les questions de durabilité, évoque dans cette tribune de ce que devrait être selon elle le panafricanisme d’aujourd’hui et de demain.

Tribune : Le panafricanisme n’est pas un dogme

Les opinions exprimées dans les tribunes ne représentent aucunement l’opinion de la rédaction de Tama Média.


Le panafricanisme a le vent en poupe. Véritable mouvement de libération du continent et d’intégration régionale pour certains activistes et penseurs alignés avec la vision des pères de ce concept, à l’instar de Kwamé Nkrumah, il est un instrument de conquête du pouvoir pour de plus en plus de politiciens en mal d’inspiration programmatique.
Les Africains ont pourtant des aspirations communes, qui relèvent de la période d’avant les indépendances et se poursuivent jusqu’à nos jours, qu’ils soient hostiles à la collaboration avec l’ancien colonisateur ou favorable à celle-ci.
Pour nous, œuvrer en faveur du panafricanisme, à notre ère, c’est fédérer les pays africains, mais surtout les peuples africains. Fédérer autour de valeurs communes, d’un idéal commun construit autour de l’évolution et du développement du continent africain, à l’aune des défis contemporains auxquels fait face l’humanité : le changement climatique, les défis environnementaux, la santé, la croissance forte et durable, l’industrialisation durable et inclusive, le travail des jeunes, les droits des femmes, la sécurité, etc. Toutes choses qui requièrent une coopération tant multilatérale que régionale entre États africains.

Sortir des dogmes réducteurs sur le panafricanisme

Pour faire face aux réalités qui menacent le continent africain en proie à une augmentation des chiffres de l’extrême pauvreté, ainsi qu’aux défis cités plus haut, il faut sortir des dogmes réducteurs basés sur des raisonnements faciles et des bon-sens à la logique simpliste, construits sur une certaine acrimonie et un certain passéisme.

Les masses doivent faire appel à leur esprit critique afin de ne pas tomber dans le piège des vendeurs d’illusions qui les lancent à la poursuite de chimères, à la poursuite de leurs propres intérêts. En parlant de chimères, je fais allusion à des mirages, à des promesses jamais tenues car impossibles à tenir, à des objectifs qui s’éloignent au fur et à mesure que les peuples s’en approchent en termes de lutte panafricaniste, parce qu’ils sont vagues, incertains et parce que les personnes qui les fixent ne possèdent la capacité d’action de les matérialiser.

Construire autour de valeurs communes

Le monde, la vie, sont faits de mouvements, de brassages, d’interactions et les rapports entre hommes sont comme les relations entre Etats : ils fonctionnent selon le mode darwinien, les plus forts parviennent au sommet. Les plus forts, ce sont les mieux organisés, les plus à même de s’adapter à l’évolution du monde, de tirer le meilleur parti des chances ou malchances qui s’imposent à eux et ce sont ces derniers qui imposent leur volonté aux autres.
Plutôt que de sombrer dans l’acrimonie et de se laisser porter par des passions ou emporter par des chimères, les Africains doivent avoir donc le souci de fédérer, de construire. Construire autour de valeurs communes, comme nous le soulignons au début de notre réflexion, d’objectifs réalisables et clairs en matière de développement du continent africain, mais aussi de leadership politique favorable à ce développement. C’est cela le panafricanisme d’aujourd’hui. C’est cela le panafricanisme de demain. C’est cela le vrai panafricanisme.

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