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Tchad : Pourquoi Mahamat Idriss Déby en veut à Moussa Faki Mahamat ? 

14 décembre 2022
5 min
Pourquoi Mahamat Idriss Deby en veut a Moussa Faki Mahamat 1
Poignée de main entre Mahamat Idriss Déby et Moussa Faki Mahamat

Depuis la présentation d’un rapport demandant au Conseil Paix et Sécurité de l’Union africaine de sanctionner le Tchad, le climat s’est détérioré entre le Président de la Commission de ladite institution et le nouvel homme fort de N’Djamena. On assiste dès lors à une sorte de « guerre ouverte à distance » entre ces deux hommes. 

On vous explique pourquoi Mahamat Idriss Déby en veut à Moussa Faki Mahamat 

Plus rien ne va entre le président de la Commission de l’Union africaine (PCUA), Moussa Faki Mahamat et le président tchadien de transition, Mahamat Idriss Déby. A l’origine des tensions entre les deux hommes : la présentation d’un rapport à charge devant le Conseil Paix et Sécurité (CPS-UA) contre le régime de transition installé à N’Djamena. Dans ce rapport, Moussa Faki Mahamat, qui est lui aussi Tchadien et ancien ministre des affaires étrangères du pays sous Idriss Déby père, a recommandé que le pouvoir de N’Djamena soit sanctionné pour non-respect des principes de l’organisation panafricaine. Cet acte, considéré par l’entourage du président de transition comme de la trahison, donne lieu à une « guerre ouverte à distance » entre les deux hommes. 

Ce que le président tchadien de transition Mahamat Idriss Déby reproche à Moussa Faki Mahamat

Le pouvoir de N’Djamena reproche à Moussa Faki Mahamat d’être « ingrat » et d’avoir des ambitions présidentielles. Mais l’accusé en rit et assure qu’il ne fait que son travail. « Au départ, on m’accusait de faire la part belle à mon pays en l’épargnant des sanctions et maintenant c’est le contraire. Je crois que c’est une querelle politicienne dans laquelle on veut m’entraîner dedans. Ce qui est évident, je suis président de la Commission de l’UA, je suis assermenté et je dois veiller aux respects des principes de l’organisation », s’est-il défendu lors d’une interview accordée à France 24 le 19 novembre 2022. 

C’est ce que pense aussi Béral Mbaikoubou, membre du Conseil national de transition, organe qui tient lieu de parlement. « Les personnes qui pensent ainsi, que ce soit par ignorance ou par mauvaise foi, ne comprennent pas le fonctionnement de l’UA. Parce que son président n’est rien qu’un exécutant de ce que décident les chefs d’Etat dans ce méga syndicat des dirigeants qu’est l’UA », élucide-t-il.  Selon lui, ces tensions entre ces deux personnalités ne sont que des querelles familiales « vu qu’elles appartiennent au même cercle politique aussi bien qu’ethnique que clanique ». Les deux hommes sont tous de l’ethnie Zakawa. Cependant, Béral Mbaikoubou exclut la théorie de « guerre ouverte. » « Faki ne fait que son travail. Il n’y a que ceux qui ne le comprennent pas qui peuvent l’en vouloir », tranche Béral Mbaikoubou.   

Les tensions sont montées crescendo

Les premières tensions entre le pouvoir de N’Djamena et le PCUA sont apparues en juin 2022. N’Djamena avait refusé d’adouber le Sénégalais Ibrahima Fall désigné par Moussa Faki Mahamat comme Haut Représentant de l’Union africaine pour accompagner la transition au Tchad. Les autorités de transition avaient accusé la Présidence de la Commission de l’UA « d’utiliser des méthodes cavalières » lors de cette nomination. Ensuite, le discours jugé moralisateur prononcé par Moussa Faki Mahamat à l’ouverture du Dialogue national inclusif et souverain (DNIS) le 20 août 2022 à N’Djamena a provoqué une autre tension. Des rumeurs les plus folles ont fait même état d’une agression verbale de Moussa Faki Mahamat par un proche du président de transition à la Cité de l’Union africaine de N’Djamena, le soir de l’ouverture du DNIS. Enfin, les sanctions voulues par Moussa Faki Mahamat contre le Tchad sont la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Pour Béral Mbaikoubou, les sanctions de l’UA relèvent plus du mythe que de la réalité. « Vous savez que l’UA même est sous perfusion de l’UE et de la Chine et d’autres puissances. Comment est-ce qu’un grabataire peut donner des coups de poings à un autre grabataire, ça ne peut pas marcher. Je crois qu’il y a plus de fanfaronnade de ce point de vue que des menaces réelles. L’UA n’a rien comme instruments pour sanctionner si ce n’est pas nous exclure de quelques réunions à blablas », conclut-il.

Par Christian Allahadjim

Correspondant à N'Djamena au Tchad