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Grand Entretien – Retrait du Mali, du Burkina et du Niger de la Cédéao : ces pays « veulent imposer leurs propres agendas de transition »

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03 février 2024
14 min

La nouvelle est tombée avec fracas le dimanche 28 janvier 2024. À travers un communiqué conjoint, le Niger, le Burkina Faso et le Mali, trois pays du Sahel aux destins liés par la lutte contre le jihadisme, rompent les amarres avec la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Comment en est-on arrivé là ? Quelles sont les implications d’une telle décision ?

Le 16 septembre dernier, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont annoncé la signature de la Charte du Liptako-Gourma, créant ainsi l'Alliance des États du Sahel (AES)

[Grand Entretien] : Ibrahima Kane, chargé des questions relatives aux institutions régionales et continentales à Open society initiative for West Africa (Osiwa), jette un regard transversal sur ce nouvel épisode d’un long feuilleton.


Tama Média : Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont récemment annoncé leur retrait « sans délai » de la Cédéao. Est-ce qu’il y avait des signes avant-coureurs ?

Ibrahima Kane dirige le programme de plaidoyer pour l'Union africaine au bureau ouest-africain de l'ONG OSIWA
Ibrahima Kane : On a, en tout cas, noté des signes annonciateurs d’une radicalisation. Mais on ne pensait pas que ça pouvait aller jusqu’à un retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).

La mission que la Cédéao devait effectuer au Niger, il n’y a pas longtemps, est tombée à l’eau. La Commission de l’organisation régionale disait avoir rencontré un problème d’avion à partir d’Abuja, au Nigeria. Cet évènement a suscité le courroux des autorités nigérianes.

Il y a toujours eu des différends portés sur la place publique entre le Mali et la Cédéao. Idem pour le Burkina Faso. Ces pays avaient commencé à s’organiser en créant avec le Niger l’Alliance des États du Sahel (AES).

En fait, ils étaient à la recherche de nouvelles stratégies car les sanctions prononcées à leur encontre par la Cédéao ont provoqué des effets dévastateurs. Récemment, ces pays ont engagé des missions à l’étranger notamment en Russie. La semaine dernière, un haut représentant de Moscou était à Ouagadougou. À partir de tous ces éléments, on peut avoir une certaine idée de ce qui se tramait.

Une chose me semble tout de même correcte dans la démarche de ces trois pays. C’est de dire que la Cédéao n’a absolument rien fait pour la résolution de la crise sécuritaire. Au Liberia et en Sierra Leone, la Cédéao, particulièrement le Nigeria, était intervenu. On n’a pas vu cela au Mali, au Burkina et au Niger qui luttent contre le jihadisme.

Il semblerait que la Cédéao avait adopté une stratégie qui devait être approuvée par les chefs d’État et de gouvernement, mais ça n’a pas été le cas à cause de l’influence des puissances occidentales qui préféraient mettre sur pied le G5 Sahel.

J’espère que la Cédéao va revoir sa copie. Au nom de la solidarité communautaire, à défaut de contribuer par les hommes, il faut fournir à ces pays des armes et d’autres moyens logistiques utiles dans le combat contre le terrorisme.

Ces trois pays sont actuellement dirigés par des juntes qui subissaient la pression de la Cédéao pour le rétablissement de l’ordre constitutionnel. Comment analysez-vous leur retrait sous ce rapport ?

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